
ESSOR 02 présent au GSEF 2023
18 mai 2023 - Johanne Morin
« Celui qui apprend, enseigne »
Proverbe africain
Le début du mois de mai a été riche d’enseignements pour la dizaine de représentants.tes du Chantier de l’économie sociale qui accompagnait les quelques 120 autres délégué.e.s issu.e.s de gouvernements locaux et de la société civile du Canada, lors du Forum Mondial de l’Économie Sociale de Dakar (GSEF2023).
« La plus grande délégation canadienne de l’histoire du Sénégal » selon Iya Touré, délégué général du Canada, lors d’une élocution présentée au Club de l’Union, où des représentant.e.s des Premières Nations, des Afro-descendant.e.s, des municipalités, du Chantier de l’économie sociale, et des 18-35 ans encadrés par Les Offices Jeunesse Internationaux du Québec (LOJIC) se sont réunis pour souligner l’apport du Québec en termes d’investissements et de partage d’outils et de bonnes pratiques auprès de la communauté internationale. Parmi l’ensemble du convoi, trois saguenéennes prenaient part à l’épopée! Chacune d’entre elles s’est initiée à l’économie sociale grâce à leur implication auprès du Café Cambio, une coop de travail de la région fondée et portée par des jeunes depuis plus de 18 ans, et d’Essor02, pôle régional d’économie sociale du Saguenay-Lac-St-Jean.
Reconnue par la communauté internationale comme un exemple à suivre en termes de soutien, d’accompagnement et d’incubation en économie sociale, l’expertise du Québec est citée et convoitée de partout dans le monde. Pour Essor02, il s’agit d’une 2e présence à l’international pour participer à un GSEF; l’expérience acquise à Bilbao en 2018 avait d’ailleurs motivé la réalisation des 2 premières éditions d’Halte, un forum régional ayant pour mission de promouvoir l’économie sociale auprès des jeunes.
Pour la première fois depuis la tenue du premier GSEF à Séoul en 2013, grâce à une coordination offerte par le Chantier de l’économie sociale, Essor02 a eu la chance d’y tenir un kiosque présentant le parcours SISMIC, un incubateur d’entrepreneuriat collectif destiné aux jeunes porteurs de projets. Notre représentante régionale, Johanne Morin, a pu y tisser des dizaines de liens auprès d’initiatives désireuses d’acquérir ou de bénéficier des bienfaits de l’incubateur développé par les pôles du Québec.
Les besoins sont grands : 80% de l’économie sénégalaise est informelle, et alors que la moitié des presque 17 millions de personnes qui y vivent n’a pas encore atteint les 18 ans, les moins de 35 ans représentent plus de 75% de la population! Pour se doter d’un filet social efficace, capable de soutenir leurs ambitions, les gouvernements locaux doivent se gréer de dispositions habilitées à encadrer le développement et l’entrepreneuriat. Ces mesures, pour une majorité des acteurs et actrices présent.e.s au rendez-vous, devront passer par l’innovation. Innover, oui, par l’entrepreneuriat collectif, mais surtout, et le message revient constamment, innover pour faire une place plus que méritée à la jeunesse mondiale –dans ce cas, africaine-, d’une part, et, d’autre part, par l’espoir qu’on accorde aux femmes et à leurs réseaux de soutien. Ces deux volets ont d’ailleurs été explicitement exploités lors des deux premières journées auxquelles se dédia la 6e édition du GSEF 2023, sous le thème « La transition de l’économie informelle vers des économies collectives et durables pour les territoires ».
Parmi les intentions d’Essor02 de participer à cet événement, figure le désir d’inscrire les démarches de notre organisme dans la mouvance internationale d’une meilleure reconnaissance de l’économie sociale comme moyen de déployer une économie respectueuse des objectifs fixés par la communauté internationale en termes d’objectifs de développement durable (ODD). À peine deux semaines avant notre départ pour Dakar, était signée, à l’ONU, une résolution vouée à reconnaître le potentiel de l’économie social pour le déploiement de ces derniers.
Sur place, nous y avons découvert et rencontré des dizaines d’organismes implantés sur les 5 continents, impliqués dans l’éducation et le soutien à l’entrepreneuriat collectif comme moyen de parvenir à un développement qui soit durable et soucieux des défis et enjeux du millénaire. Institutions bancaires et de micro-crédit, initiatives scolaires et gouvernementales, politiques locales, projets-jeunesse et associations dévouées à la réalisation des ODD étaient à l’honneur.
Notre incubateur SISMIC n’a pas manqué d’éloges : afin que les projets et solutions imaginés par la jeunesse et les nouveaux acteurs du développement se forgent une place pérenne sur les marchés, en contribuant positivement au développement des territoires où ils se déploient, l’accompagnement professionnel qu’offrent les programmes et parcours d’incubation est essentiel.
Au Québec, le Secrétariat à la Jeunesse reconnaît cette expertise, et permet aux pôles ÉS de bénéficier d’un financement pour soutenir une partie des activités qui y sont rattachées. Nous sommes en droit de nous demander comment, au-delà des discours et des grandes conventions, pouvons-nous mettre en place une plus grande équité au niveau international dans l’accès à ce type de services, notamment dans les pays les plus susceptibles d’être affectés positivement par un meilleur encadrement en termes de formalisation de l’économie, ET en termes de retombées socio-environnementales.
De nombreux constats peuvent et se doivent d’être retenus des discussions et activités qui ont eu lieu sur le territoire de celle qui se déclare désormais comme « Dakar : capitale de l’économie sociale ». La reconnaissance du travail informel n’est pas l’enjeux que de l’Afrique : ici encore, dans nos régions, nous devons poursuivre la réflexion et l’avancée des actions en lien avec le soutien du travail invisible, encore largement déclamé par les mouvements sociaux.
Parce que oui, lorsqu’on se demande comment l’économie sociale contribue à améliorer le destin des communautés qu’elle implique, il importe d’abord et avant tout de reconnaître l’ensemble du travail et des efforts fournis par chacune de ses parties prenantes, y compris par nos mères, nos épouses et nos filles. Qu’elles soient natives ou nouvellement arrivées au pays, ce sont elles qui, mondialement, soutiennent la partie émergée de l’iceberg de notre économie. Nous nous devons, collectivement, de reconnaître cette contribution afin de trouver, ensemble, les solutions qui nous permettront d’évoluer dans un développement plus durable.
Être un chef de fil ne fait pas du Québec l’eldorado de l’économie sociale. Ici comme ailleurs, sa contribution au développement local, régional et national est encore trop souvent perçue comme une utopie militante marginale. Ses retombées sociales, environnementales et économiques sont très peu chiffrées, et la proximité qu’elle entretient avec les valeurs communautaires lui méritent plus souvent qu’autrement des préjugés peu flatteurs à l’égard de sa viabilité.
Il nous apparaît essentiel, au retour d’un tel événement, de poursuivre nos efforts pour une meilleure diffusion et compréhension de ce modèle auprès des entrepreneurs, des divers organismes de développement économique et social, ainsi qu’auprès de nos élus.
Pour consulter la déclaration de Dakar du 6 mai : GSEF 2023 Déclaration de Dakar (socioeco.org)