
Économie sociale X culture: Création de valeur collective
19 mars 2019 - Gabrielle Desbiens, directrice générale de Culture Saguenay–Lac-Saint-Jean
Basée sur des principes de collaboration, de développement économique appuyé sur une mission sociale, sur une vision de la gouvernance autonome et démocratique ainsi que sur l’innovation, l’économie sociale peut résolument s’incarner dans les organisations culturelles. À l’ère de la nécessaire collaboration facilitée par la transition numérique, celles-ci gagneraient à se positionner comme tel. Aperçu d’une alliance stratégique qui a le potentiel de créer davantage de valeur collective.
L’économie sociale mise sur des pratiques de gouvernance démocratique et d’autonomie de gestion, envisage la contribution à l’activité économique à l’opposé du modèle capitaliste – ainsi qu’à la recherche de profit absolu – et s’incarne dans des stratégies de coopération et de collaboration (visant le partage et mutualisation de services et de moyens). Ces éléments à caractère social et à échelle humaine résonnent avec les valeurs du milieu culturel.
Le secteur artistique et culturel comprend les organisations et individus œuvrant en arts visuels (incluant métiers d’art et arts médiatiques), arts de la scène (théâtre, danse, arts du mouvement), le patrimoine (musées et sociétés d’archives), l’édition et le livre, l’enregistrement sonore, le cinéma et l’audiovisuel ainsi que les médias et organismes de communication. Depuis les années 1990, plus précisément depuis la première Politique culturelle du Québec de 1992, le milieu culturel est de plus en plus reconnu comme un agent de développement territorial et local.
Ce secteur d’activités est un acteur économique majeur dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean. En 2012, 1 795 travailleurs y œuvraient et généraient plus de 211,6 millions de dollars en retombées. En comparaison pour la même année, le secteur de l’agriculture générait des retombées de 136,4 millions et l’industrie forestière, 120, 2 millions de dollars. Au Québec, ce secteur d’activité regroupe des dizaines de milliers de travailleurs contribuant à la hauteur de 12,5 milliards de dollars, soit 5 % de notre PIB.
Bien que les chiffres prouvent son impact sur le développement économique, le milieu culturel fait face à des défis majeurs dans son développement. Ces défis sont, notamment, la précarité des emplois, le manque de reconnaissance comme agent économique d’importance ou encore un déchirement entre l’affirmation du rôle social essentiel joué par les organismes culturels et les artistes et la revendication de la nécessité du soutien à la recherche et à la création.
À toutes fins pratiques, les principes et valeurs de l’économie sociale et solidaire incarnent les éléments positifs d’une transition du milieu culturel vers une économie créative, permettant d’ancrer le rôle de l’art et de l’artiste dans la société, tout en améliorant le soutien des pratiques de recherche et création. Elle offre une voie entre les revenus « tous publics » et « tous marchands » et propose une logique entrepreneuriale innovante misant sur des valeurs d’intérêt général, de démocratie et de non lucrativité. Elle propose une vision alternative de l’entrepreneuriat qui peut contribuer à diminuer la précarité des acteurs culturels.
En réciprocité, le milieu culturel, par son rôle comme acteur de développement des communautés et vecteur de cohésion sociale, embrasse de plus en plus les principes du développement individuel et collectif visant l’émancipation et la dignité des personnes et des groupes. Ainsi, les organisations culturelles et artistiques travaillent à cet équilibre entre une forme de rentabilité et de service à la communauté (par exemple : en offrant des services ou des équipements à leurs membres). Ce sens de la collectivité s’incarne tout autant dans la mise en valeur des talents locaux ou dans la mutualisation de ressources (humaines, techniques et matérielles), ayant pour effet la consolidation d’emplois et la rentabilité des achats d’équipements spécialisés. Enfin, la créativité étant un élément intrinsèque au milieu culturel – dans le travail créatif des artistes, mais également dans les pratiques de gestion – elle participe à l’émergence de l’innovation permettant une croissance saine et stable des organisations.
Les parallèles à faire entre l’économie sociale et solidaire seront explorés dans le cadre d’une journée d’ateliers de réflexion avec le milieu culturel du Saguenay–Lac-Saint-Jean le 9 mai prochain, au Camp musical du Saguenay–Lac-Saint-Jean (Métabetchouan–Lac-à-la-Croix).
Pour les détails de cette journée, surveillez nos activités: www.cultureslsj.ca
Pour en savoir plus, voici les liens vers les ouvrages consultés pour composer ce texte :
https://chantier.qc.ca/wp-content/uploads/2017/06/ES-ministereculture-definition-juin2002.pdf
https://depot.erudit.org/bitstream/004181dd/1/R-2008-03.pdf
http://www.lelabo-ess.org/IMG/pdf/rapprocher_l_ess_et_la_culture_rapport_latarjet_vf-3.pdf
http://culturesaguenaylacsaintjean.ca/ressources-culturelles/la-culture-et-l-economie